Trévizac : le nouveau roman de Xavier-Marie Garcette

Trévizac : le nouveau roman de Xavier-Marie Garcette

7 juillet 2022 0 Par Solène W.

Inutile de chercher où se situe le domaine de Trévizac dans le Limousin, car le récit imaginé par Xavier-Marie Garcette est une fiction. Pourtant, celle-ci paraît terriblement vraie, grâce à une écriture très spontanée. Cet ouvrage de plus de deux-cent-cinquante pages divisé en 46 chapitres se dévoile sous la forme d’une déclaration d’amour : celle d’un petit-fils devenu soixantenaire, en la mémoire de sa grand-mère adorée.

Jean Dussoubs a été élevé par Madeleine, dépeinte comme une dame joyeuse, toujours prête à festoyer. Danseuse de charleston et érudite, celle-ci est issue d’une famille riche et privilégiée. L’intrigue prend place en plein cœur du Limousin, avec quelques détours par Limoges ou Paris. Jean grandit dans un château de la Renaissance. Afin de sensibiliser le lecteur et ainsi créer un lien entre ce dernier et les personnages, l’auteur s’attarde sur les origines de Jean, mais aussi de Madeleine. Au fil de la lecture, de nombreux éléments centraux de l’Histoire de la France apparaissent, accentuant l’immersion du lecteur dans le récit.

Par exemple, la grand-mère raconte ses « petites affaires » : résistance contre l’Allemagne nazie, mariage après la libération de Paris, élection de Giscard d’Estaing… À l’aube de ses dix-huit ans, Jean entend bien gâter son aînée, qui lui a légué un capital conséquent afin de se lancer au mieux dans la vie. « Je ne vis pas avec une vieille grand-mère, répliquai-je, je vis avec une fée ! » dit-il dans le chapitre seize. Mais celui qui a grandi éloigné des bottins mondains pénètre cet univers qui ne lui est guère familier. Avec aisance, il parvient néanmoins à apprendre les codes, tout en conservant cet aspect unique qui fait sa différence.

         Tandis qu’il est introduit dans des soirées où le luxe est de mise, celui-ci n’hésite pas à « tout plaquer » pour porter assistance à sa grand-mère, lorsque cette dernière en a besoin. Puisque Madeleine est décrite avec beaucoup d’amour, l’état de santé concerne le lecteur qui s’investit aux côtés de Jean. Face à tant de chamboulements, l’étudiant en Droit Jean se plonge dans le travail. Malgré l’inquiétude, il obtient d’excellents résultats avec son collègue Arsène.

Fort heureusement, la situation connaît une amélioration : il est donc grand temps pour Madame d’organiser différemment sa vie. Autrefois très indépendante et en forme, son accident la fragilise. L’arrivée d’Irina, la belle infirmière à en devenir s’annonce difficile. Jaloux, mais conciliant, Jean finit par s’y attacher. Une trouvaille spectaculaire dans le château va totalement bouleverser l’existence de la famille et plus particulièrement celle du trio Jean-Madeleine-Irina. Le commissaire-priseur Vayrac, un proche du clan vient estimer la découverte d’une toile originale, peinte par un éminent artiste, plusieurs décennies auparavant…

 Une réussite ou une ascension rapide peuvent déstabiliser. Surtout lorsqu’elles sont accompagnées d’une chute sévère. En réalité, rien ne prédisposait Jean à connaître un destin aussi spécial. Face aux évènements exceptionnels et tristement ordinaires qui régissent sa vie, celui-ci n’a d’autre choix que de survivre. Craignant d’aimer par peur de la solitude et de l’abandon, le héros atypique fait bien preuve de sagesse que d’innocence. Ce lien privilégié avec Irina prend une forme unique en son genre, cette rescapée révèle un des passages les plus sombres du roman.

         Grâce à des personnages profonds, aucun des protagonistes n’est tout à fait parfait ou mauvais. Ils sont tous habités par une humanité spécifique, embellie par la tendresse d’un jeune pour une grand-mère adorée. Celle qui est devenue veuve très jeune n’a jamais perdu de sa superbe, même en pleine tourmente. Inspiré par cette force de la nature, Jean prend forme. Il évolue, passant de petit garçon à adolescent, de jeune adulte à homme. Avec ces rencontres qui semblent anecdotiques, l’auteur prévoit en réalité un terrain fertile, idéal pour nouer des intrigues puissantes.

Les enfants uniques sont souvent surprotégés : le lien avec leur parent les isole du reste du monde. Ils deviennent fusionnels, incapables de vivre l’un sans l’autre. Et pourtant… Cette force qui unit le personnage de Jean à Madeleine force le respect et fait rêver. Une belle leçon de courage, qui prouve que la détermination n’a pas d’âge. Au-delà de la santé, la foi constitue une porte de sortie, afin de mieux résister à la souffrance. Par ailleurs, cette croyance n’est pas spécifiquement orientée vers un Dieu ou un être supérieur. Celle-ci peut tout simplement se trouver dans le cœur d’un être aimé.

Le site de l’auteur : https://xaviermarie-garcette.fr/