L’Autre-Terre est un livre-outil multidimensionnel qui parcourt la vie de Marguerite Laleye
6 février 2024Avec « L’Autre-Terre : Méditations, rituels, connexion au vivant », paru le 24 octobre 2023, aux éditions Bookelis, Marguerite Laleye invite à un véritable voyage intérieur. Et c’est une expérience interactive et spirituelle qui attend le lecteur au détour des pages et des rituels proposés par la thérapeute et autrice, habituée des livres de développement personnel. Rencontre introspective.
Dans une société toujours plus urbanisée dans laquelle la relation avec la nature est mise à mal, peut-on encore facilement se reconnecter au flux de vie en soi ? Et si finalement nature intérieure et monde vivant étaient plus liés que nous le pensons ? C’est autour de ces questionnements que Marguerite Laleye invite à s’interroger. Un voyage intérieur, intime mais aussi spirituel que l’autrice Suissesse, d’origine béninoise, aux influences chamaniques, a elle-même parcouru. D’artiste polymorphe, qui a peut-être un peu de mal à se définir, la thérapeute a finalement tranché après un long travail thérapeutique holistique. C’est désormais « habitée par la vie » qu’elle se décrit le mieux. Espérons que nous trouvions nous aussi de quoi mieux se définir et peut-être alors parviendrons-nous à L’Autre-Terre.
Anaïs Delatour : Vous êtes entrée dans l’écriture par la poésie, avec un recueil intitulé Des roses et des lèvres. Pourquoi cette forme littéraire ?
Marguerite Laleye : C’est ce qui est venu en premier. J’écrivais des petits textes qui me rappelais les poèmes qu’on étudiait à l’école. C’est une manière plutôt intuitive et sensible de commenter l’écriture. Je me suis lancée sans trop me poser de questions.
Ensuite, vous avez enchaîné les livres de développement personnel. L’écriture d’un livre correspond-elle à un besoin de réflexion, de cheminement personnel de votre part ?
Chaque livre s’inscrit dans une période particulière de ma vie, à un moment où quelque chose de significatif se passe. C’est une manière de grandir. Quand j’ai fini un livre, j’ai pour habitude de le relire quelque temps après et il m’arrive de redécouvrir complètement une part de moi-même.
Et pour L’Autre-Terre, que s’est-il passé dans votre vie ?
D’abord, c’est un livre que j’ai écrit après une longue pause dans l’écriture. Je le vois comme un outil multidimensionnel qui parcourt ma vie, depuis ma naissance à aujourd’hui.
Multidimensionnel ?
Oui, j’avais envie de réunir mon parcours évolutif sur différents plans : l’imaginaire et le réel, les thérapies que j’ai fait dans ma vie, les transformations qu’elles ont créées, les questionnements dans mon esprit. Un mélange de plusieurs plans à des périodes différentes de ma vie en y mêlant aussi différentes passions avec le dessin et la poésie.
Votre livre explore en effet plusieurs formes. On y trouve aussi des espaces de réflexion construits comme des fiches avec des questions, des mots clés ou encore des rituels. Comment avez-vous construit ces fiches ?
Les clients que j’accompagne m’ont inspiré avec ce qu’ils vivent et les exercices que l’on pratique ensemble. J’ai moi-même pu expérimenter certaines choses. Mon idée pour les fiches était d’abord de partir d’une vision générale sur un sujet avant de me jeter à l’eau avec ma propre histoire et de donner des clés sur la manière dont j’ai fait face à tel moment difficile comme heureux. C’était ensuite important pour moi d’entraîner le lecteur dans un voyage intérieur à travers des questions qui permettent de s’interroger et de se situer. Quant aux mots clés, ils servent à ouvrir d’autres univers. Et bien sûr, il y a un côté créatif avec les rituels.
Pourquoi le sujet du développement personnel vous anime-t-il tant ?
Parce qu’il fait partie de la vie ! Mais c’est vrai que j’y suis sensible car j’ai eu plusieurs moments difficiles dans mon existence pendant lesquels je me suis posée beaucoup de questions. Les gens que j’accueille dans mon cabinet arrivent aussi avec les leurs. C’est sans doute pour ces deux raisons que le développement personnel est devenu central pour moi. Il fallait que je sache comment me sortir de ce que je traversais et quel sens y donner. Des questionnements existentiels en somme avec cette grande question au centre : « Comment réussir à être heureux avec la complexité (et la cruauté parfois) de la vie ? ». Vaste sujet non ?
Vous parlez beaucoup de renaissance dans votre livre. Doit-on forcément toucher le fond pour renaître selon vous ?
Sans doute pas. Il est important de nommer les choses et de se situer. Plus j’avance avec les gens que j’accompagne, plus ce qui ressort est l’importance de cette prise de conscience et la capacité de créer avec ce qui nous arrive, d’accueillir la situation et de composer avec tous les éléments en notre possession. Il arrive parfois que le fait de nommer les choses amène à se rendre compte qu’on touche le fond.
Et que doit-on faire dans ce cas précis ?
On doit passer par de l’authenticité. Parfois, on se ment à soi-même pour se protéger. Il faut au contraire ici réussir à retrouver de la clarté vis-à-vis de soi.
Finalement, votre livre pourrait remplacer une thérapie chez un.e psy, non ?
Ils ne seraient pas très contents (rires) ! Mais c’est vrai qu’il semble qu’il y ait quelque chose de vibratoire dans ce livre dans le sens où les lecteurs ont vraiment été touchés dans leur chair selon les retours que j’ai eu. Il y a comme un processus qui s’enclenche.
Pensez-vous que ce genre de livres peut s’appliquer à tout le monde ?
Je ne pense pas. Il n’y a évidemment jamais rien de complètement inintéressant. Il y a des choses à prendre partout mais il faut forcément être un peu ouvert à la spiritualité pour être touché par mon livre. Cela dépend donc de la manière dont les gens aiment être bousculés, remis en question, touchés, entrer en lien avec la vie finalement.
Que répondez-vous aux sceptiques du développement personnel qui lui reproche notamment une trop forte individualisation des problèmes et un effet de culpabilisation ?
Il y a tellement de choses associées au développement personnel aujourd’hui que l’on peut se sentir perdu et trompé par certaines approches. La mienne est de simplement donner des outils pour s’ouvrir à la vie ! Et à ce que je sache, nous sommes toutes et tous élève à l’école de la vie ! La vie, et le vivant, pratiquent de toute façon sur nous une forme de développement qu’on le veuille ou non. Après, des livres, des approches et des théories ouvrent des espaces de réflexion. Mais chacun est libre de s’en servir ou non.
Des questions fondamentales que vous posez, comme « Qui sommes-nous ? » ou « D’où venons-nous ? » peuvent être très anxiogènes, non ?
Je peux imaginer. D’ailleurs, je suis moi-même passée par des états anxiogènes avant de pouvoir les exprimer clairement. Je pense qu’on a tous peur de regarder les choses en face et de s’y perdre. Il y a tellement de peurs possibles à différentes étapes de la vie.
Et vous, quelle est votre plus grande peur ?
Parmi les questions existentielles, celle de la mort reste inquiétante. J’en parle dans ce livre sans y apporter de réponse finale. Peut-être que la réponse à la mort serait de rester en chemin, en transformation, en évolution, en guérison.
Vous dédiez ce livre à Gaïa, comme une ode à la Terre nourricière. Etes-vous une fervente écolo ?
Pas du tout. Je pense qu’avec ce livre, j’avais vraiment envie de partager notre imperfection, notre humanité finalement. Je ne pourrais pas dire que je fais tout scrupuleusement de manière écologique. En même temps, c’est difficile de cocher toutes les cases à 100%. Cela peut même amener à être dur avec soi et à se juger en cas de manquement. Mais bien sûr, je suis extrêmement touchée par la nature. J’apprends à la protéger, à aligner ce que je ressens avec ma manière de vivre. Je suis plutôt dans une écologie intérieure.
Que mettez-vous derrière ce terme d’écologie intérieure ?
Il renvoie pour moi à explorer sa nature intérieure dans le sens où comment pourrait-on aimer la terre si on n’aime pas notre nature ? C’est quelque chose que j’ai beaucoup exploré moi-même. Plus je me connecte au vivant en moi, plus je me connecte à la Terre-Mère. Et c’est parfois au tour de la Terre-Mère de me guérir et de me permettre de me reconnecter à moi-même.
Par Anaïs Delatour.